A l'heure des départs en vacances, des départs à la retraite, des bilans d'une année ou d'une vie, un grand vent de nostalgie souffle emportant les années, celles qui nous précédent, tristes ou heureuses, celles qu'il nous reste à vivre, et dont on ne sait, fort heureusement de quoi elles seront faites.
Me vient alors en tête le fameux Je me souviens de Georges Perec.
Je me souviens du premier livre que j'ai lu, Pipo chevalier sans reproche...
... à moins que ce ne soit Godefroy petit page.
En tout cas, c'était la Bibliothèque Rouge et or, tellement plus élégante que la Bibliothèque verte, et qui se déclinait en deux collections : "Dauphine" en petit format, "Souveraine", en grand format...
Je me souviens de L'Avare de Molière dont mon instituteur de CE 2 nous avait fait apprendre par cœur l'entrée en scène d'Harpagon: "Hors d'ici tout à l'heure et qu'on ne réplique point..."
Je me souviens du premier film que j'ai vu au cinéma et qui m'a fortement impressionné:
Ai-je imaginé la scène du prisonnier réduit à vivre dans un tonneau renversé comme une niche de chien? Existe-t-elle vraiment, cette image terrible? Nos souvenirs sont quelquefois imaginaires.
Je me souviens des terreurs nocturnes de mon enfance, causées par Belphégor et le commissaire Bourrel...
Je me souviens de la revue de propagande communiste que mon grand-père maternel lisait religieusement à la maison: Études soviétiques...
... tandis que mon autre grand-père préférait s'adonner aux joies du tiercé avec sa fascinante pince perforatrice. Il passait des heures à mettre sur pied des martingales impossibles...
Notre personnalité, que nous croyons avoir forgée de toutes nos réflexions individuelles, est ainsi faite de ces illusions de tous ordres que nous recevons en grandissant dans un certain milieu.
Si je n'avais pas eu comme compagnons d'enfance les imaginaires Pipo ou Godefroy, si je n'avais pas lu à dix ans Molière, si je n'avais pas tremblé de peur devant la cruauté humaine et l'obscurité du Louvre nocturne, si je n'avais pas cru à certaines utopies, serais-je ce que je suis?..
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