mercredi 10 juillet 2013

STARBUCK


S'il y a bien quelque chose que je ne supporte pas au cinéma, c'est d'avoir l'impression d'être le scénariste-dialoguiste-réalisateur du film que je suis en train de regarder, autrement dit de ne pas être surpris. Quand la réplique que je prévois arrive, quand l'image que j'attends apparaît, je me fais la réflexion suivante: "C'est pas possible de ne pas avoir plus d'imagination que moi!" et ça m'énerve de voir que des professionnels sans talent ont eu les moyens de concrétiser leurs petites idées, alors que tant d'autres rencontrent les pires difficultés pour réaliser les leurs.
Starbuck de Ken Scott est un film à un neurone, un seul, ce qu'on appelle "le pitch": le héros (évidemment un anti-héros d'aujourd'hui, un quadragénaire attardé à la Jude Apatow) est le père biologique de 533 enfants. Voilà, c'est tout, vous avez vu le film, passez votre chemin. Le "si pittoresque accent" de nos "cousins du Québec" ne rend pas drôles des répliques d'une platitude affligeante. L'interprétation est quelconque: le rôle du copain avocat raté est tenu par un acteur dont j'ai bien vite oublié le nom tant il est mauvais.
Le plus insupportable de tout est le pathos artificiel dans lequel on baigne pendant plus d'une heure et demie. Pas une scène sans embrassade, sans larme; on a droit à tous les clichés sur la tolérance, la différence que l'on doit accepter.
A remarquer que la mère est totalement absente de cette édifiante histoire sur les vertus de la famille: vers la fin, un être transparent, diaphane accouche d'un bébé. On avait fini par penser que seul le sperme (dont il est abondamment question dans le film) était à l'origine de la vie. Derrière certains films de ce type, qui se veulent "corrosifs", se cache l'esprit le plus réactionnaire qui soit.
Le film a remporté un triomphe au Canada, un certain succès en France (500 000 spectateurs, mais c'est pas le Pérou quand même) et 3 (trois) remakes sont prévus....
Quelques motifs de consolation: le film a été descendu en flammes par les critiques du Monde et de Libération. Positif n'en parle même pas (excellent signe...). Télérama lui a accordé deux T, "film à ne pas manquer"... Cherchez l'erreur...