Le dernier opus en date des frères Coen est un nouveau témoignage de leur talent, pour ne pas dire "génie", proprement singulier et véritablement original, loin des clichés enfilés dans des films qui ne reposent que sur des "pitches"(?) squelettiques. Comment être drôle sans être cynique? Comment amuser le public sans mépriser ses personnages? A ces questions, le film relatant l'histoire de Llewyn Davis répond magnifiquement bien. Un looser qui a du talent mais qui arrive peut-être trop tôt dans l'histoire de la musique américaine, un homme qui ne fait que de mauvaises rencontres dans des lieux improbables, un homme qui rate tout, qui n'est pas foncièrement sympathique avec sa petite amie, qui est même incapable de garder le chat qu'on lui a confié: bref, un anti-héros attachant, drôle sans le vouloir. Si l'on ajoute une musique mélancolique et gaie, une construction qui réserve des surprises et une scène finale rétrospectivement prophétique, on n'est pas loin du chef d'œuvre.
Voici Oscar Isaac chantant avec Justin Timberlake une chanson d'anthologie:
Parmi ses rencontres, celle avec John Goodman restera une séquence culte:
Deux scènes m'ont surtout paru intéressantes par l'attention minutieuse et respectueuse que les Coen attachent à des personnages grotesques dont il serait facile de se moquer: la secrétaire de l'impresario de Llewyn Davis, dont on peut dire qu'elle pâtit d'un physique ingrat, est traitée avec une empathie rare; les deux couples de professeurs d'université sont un modèle de caricature généreuse. Quand on réussit de telles silhouettes au cinéma, c'est qu'on est très fort...