samedi 28 décembre 2013

LES GARCONS ET GUILLAUME, A TABLE!

Une autre comédie française "de bon aloi", comme disait feu maître Capélo: de bons acteurs, des scènes franchement drôles, un scénario où l'auteur ne s'est pas contenté d'aligner paresseusement des clichés à partir d'un "pitch" squelettique. Le film aborde un sujet original, délicat, avec des nuances et de la complexité. On apprécie le travail de Gallienne acteur, dans son double rôle; on goûte le travail de Gallienne auteur dans son écriture, sa réflexion intéressante sur les rapports entre l'art et la vie. Si l'on voulait tout ramener à Proust, on pourrait dire que ce film raconte comment on devient un artiste.

MAIS....


Mais Gallienne n'est pas encore un cinéaste.

mercredi 18 décembre 2013

QUAI D'ORSAY



On n'attendait pas Tavernier dans ce registre et on se dit que c'est bien dommage qu'il n'ait pas pu (voulu) réaliser une comédie aussi hilarante que ce Quai d'Orsay, tiré d'une BD que je n'ai pas lue. Cela faisait bien longtemps que je ne m'étais pas autant amusé au cinéma et la scène du "Stabilo qui peluche" m'a donné un fou-rire inextinguible. Ce que j'ai particulièrement apprécié dans ce film, c'est qu'il ne s'embarrasse pas de considérations psychologisantes: on ne sait rien de la vie privée du ministre ou de son chef de cabinet, et de ses multiples conseillers. Ils sont des personnages de cinéma et cela suffit amplement. Seul le rôle interprété par Raphaël Personnaz est plus complexe parce qu'il est celui auquel le spectateur néophyte s'identifie. En dehors de cet unique "être humain", les autres ne sont que des pantins; mais Tavernier ne les méprise pas, ne les regarde pas de sa hauteur condescendante. Il s'en amuse, mais les respecte aussi. Tous ces gens travaillent, mine de rien. Tous ces gens tentent d'œuvrer pour améliorer les choses, même si leurs efforts sont vains ou ridicules. Parfois, après des centaines de brouillons rejetés, refusés, stabilotés, il arrive qu'un Villepin prononce un grand discours à l'ONU, un discours qui sauve l'honneur d'un pays, et nous montre un homme simplement humain. C'est ça le grand art de Tavernier.

lundi 9 décembre 2013

A TOUCH OF SIN

J'avais beaucoup apprécié Still Life et The World de Jia Zhang-ke et voilà que son dernier opus, A touch of sin, malgré le Prix du Scénario à Cannes et une presse exclusivement dithyrambique, me déçoit. Une nouvelle fois, je ressens l'impression d'être un peu seul de mon avis et je me pose des questions.
Le film est constitué de quatre histoires, vaguement reliées entre elles. D'où ma surprise de voir ce scénario paresseux primé à Cannes. Jia Zhang-ke avait d'abord songé à huit sketches, pourquoi pas douze ou vingt-quatre? On a la désagréable sensation qu'il a compilé tous les maux de la Chine moderne et qu'il en a dressé une liste: corruption, prostitution, accidents du travail, mauvais entretien des trains à grande vitesse, etc, etc. On peut être sûr qu'il n'a rien oublié. Et chacun de ces points est illustré par la même réaction de la part de ceux qui en sont les victimes: la violence, la mort qu'ils donnent ou qu'ils se donnent. Et c'est là que le film devient même douteux, voire nauséabond. Le mineur, que Télérama juge "charismatique", et que je considère comme un psychopathe bas de plafond, se mue en justicier à la Bronson des grandes années du cinéma fasciste américain, et flingue tout le monde. Et le même nihilisme vain s'empare de tous les personnages confrontés aux horreurs de la Chine contemporaine. Peut-on d'ailleurs parler de personnages devant cette galerie d'incarnations métaphoriques? Je ne suis pas parvenu une seconde à prendre en pitié ces redresseurs de torts, à m'intéresser à leurs malheurs. Certes, la mise en scène est fluide et élégante, mais le propos dangereux. La seule solution est-elle dans ce dézingage systématique, en dehors de tout raisonnement, de toute prise de position vraiment politique? La seule solution est-elle dans le règlement de comptes individualiste? Le regard que porte le metteur en scène sur ces comportements extrêmes me paraît en empathie totale avec ces actes violents et inutiles. La pulsion l'emporte sur la réflexion, l'égoïsme sur la solidarité.
Jia rêvait de tourner un film d'arts martiaux: il aurait mieux fait d'y aller directement plutôt que de passer par l'intermédiaire d'un film pseudo-politique.