vendredi 14 mars 2014

LE VENT SE LEVE

Ce qui m'a toujours un peu agacé chez Hayao Miyazaki, c'est sa pseudo-philosophie que je qualifierais de "new age de bas étage", si des personnes, plus compétentes que moi dans ce domaine, ne m'avaient assuré qu'elle fait partie intégrante de la culture nipponne. J'ai toujours été allergique à ces histoires de déesse des mers, de nature protectrice, de château ambulant. En revanche, quand Miyazaki traite de problèmes et de sentiments humains, je trouve ses films particulièrement fins et touchants. Je suis tout prêt à admettre qu'un cochon soit aviateur dans Porco Rosso, à partir du moment où celui-ci est aux prises avec des préoccupations politiques qui m'intéressent. Je suis tout prêt à admettre que la petite Ponyo soit issue des flots à partir du moment où Miyazaki me parle aussi des rapports entre de petits enfants et les pensionnaires d'une maison pour vieillards. Je suis tout prêt à admettre l'existence d'un monstre poilu à partir du moment où Mon voisin Totoro est le fantasme rassurant d'orphelins qui viennent de perdre leur mère... (et que les roses trémières sont belles!)
Dans Le vent se lève, il est question du rêve que poursuit un jeune ingénieur: celui de construire des avions qui volent dans le ciel, qui nous éloignent, mais jamais complètement, des soucis de nos vies bassement quotidiennes et banalement terribles, marquées par les catastrophes naturelles et la mort. Et l'idéaliste parviendra à concrétiser son souhait venu de l'enfance. Belle leçon d'optimisme et de confiance en l'homme. Et qu'on ne vienne pas dire que ces avions deviendront d'horribles engins meurtriers au service de l'Empire allié aux nazis. Miyazaki, loin d'esquiver le problème, le traite clairement et ceux qui mettent en doute l'idéologie de son film ne l'ont pas bien vu.
Il est question aussi d'une très belle histoire d'amour, pathétique, où plane l'ombre de Thomas Mann et d'Hans Castorp.
Les dessins et l'animation sont particulièrement réussis, Miyazaki "montre" le vent, comme je ne l'avais jamais vu.
Et quel plaisir d'entendre du français dans un film japonais. "Le vent se lève! Il faut tenter de vivre!" C'est du Paul Valéry. C'est aussi une belle leçon de vie, de résistance face au malheur.